Vienne – aux prises il y a cent ans avec le problème de la langue nationale menacée. Dans son livre L’impossible exil de Stefan Zweig, où il se concentre sur les dernières années du célèbre écrivain autrichien, George Prochnik décrit ainsi la Vienne de l’époque :
« Parce qu’elle était un pôle d’attraction pour les migrants depuis longtemps, et parce qu’elle comprenait des populations slaves, hongroises, allemandes et italiennes, Vienne était une ville où le sentiment d’appartenance impliquait toujours aussi un ailleurs – si tant est qu’il existât. Dans ce sens-là, elle était à la pointe de la modernité. Le poète Charles Péguy voyait dans cette condition un élément spécifiquement juif : “Être ailleurs, le grand vice de cette race, la grande vertu secrète, la grande vocation de ce peuple”, écrivait-il. Cette aptitude viennoise à être, appartenir à un ailleurs, quelles que soient ses racines ethniques, faisait de cette ville un lieu où les questions d’allégeance nationale étaient particulièrement sensibles. De violents débats sur le droit de parler d’autres langues que l’allemand dans les écoles et dans l’administration y avaient cours en permanence. »
